Le 5 juin 2017 - Comité plénier - La commissaire aux langues officielles Madeleine Meilleur

La sénatrice Poirier : Madame Meilleur, j'aimerais tout d'abord clarifier avec vous que je ne remets en aucun temps en question votre feuille de route ou vos compétences, mais plutôt le processus de nomination.

Depuis votre nomination, la communauté francophone est grandement divisée, surtout en Acadie. D'ailleurs, la Société des Acadiens du Nouveau-Brunswick a exigé une reprise du processus de sélection, en constatant que votre nomination est en train de politiser un poste qui devrait jouer le rôle de chien de garde de la francophonie. Aujourd'hui, on apprend que la SANB déposera une requête de contrôle judiciaire à la Cour fédérale.

Sachant que la confiance de plusieurs organismes francophones et anglophones a été affaiblie, comment croyez-vous pouvoir les rassurer?

Mme Meilleur : Je vous remercie, madame la sénatrice, de cette question. Dans ma carrière, j'ai toujours œuvré pour la francophonie et l'avancement des services en français en Ontario. Le poste était ouvert, et j'y ai posé ma candidature. Il y avait déjà un processus très rigoureux qui avait été établi. J'ai franchi toutes les étapes du processus, et je pourrais vous en dire davantage à ce sujet.

J'ai été très heureuse d'avoir été choisie et, bien sûr, je lis, comme vous, les commentaires et les inquiétudes à l'égard de ma carrière politique. Oui, j'ai travaillé dans le domaine de la politique pendant 25 ans, et pendant presque 13 ans en politique active et partisane. Par contre, lorsqu'il s'agissait de la cause francophone, même si je faisais partie du gouvernement, j'étais tout de même le chien de garde des Franco-Ontariens. J'ai toujours milité en leur faveur, je m'opposais et j'essayais de convaincre mes collègues du même parti politique que moi. J'étais la seule francophone au sein du Cabinet.

Je peux vous parler de l'hôpital Montfort, par exemple. Je suis une « diplômée » de l'hôpital Montfort. Je suis montée aux barricades pour l'hôpital Montfort. Lorsque j'étais ministre, j'ai veillé à ce que le gouvernement finance l'agrandissement de cet hôpital, qui ne figurait pas sur la liste de ceux qui allaient recevoir des fonds pour des travaux d'agrandissement. Plus tard, on lui a donné le statut d'hôpital d'enseignement. J'ai voulu cela aussi, car l'hôpital Montfort n'avait pas ce statut auparavant. Maintenant, on y forme des professionnels de la santé en français.

J'ai aussi créé le poste de commissaire aux services en français. Vous savez comme moi que, au sein d'un caucus, tout le monde n'a pas la même opinion et que tous ne sont pas francophiles. J'ai mis de l'avant des arguments et j'ai pu convaincre mes collègues du bien-fondé de la création de ce poste.

De plus, la chaîne TFO, qui faisait partie de la chaîne de télévision éducative TVO, dont le gouvernement de l'Ontario est propriétaire, était associée à la chaîne TVO. Alors, j'ai demandé et j'ai réussi à convaincre mes collègues de donner son autonomie à TFO, parce qu'il nous semblait que cette chaîne était brimée en étant liée à TVO. Maintenant que la chaîne TFO est autonome, vous avez vu grandir ce joyau qui rayonne à travers le Canada et sur la scène internationale. Je pourrais vous donner de nombreux exemples qui démontrent que, même si j'étais membre d'un parti politique, j'ai toujours mis les francophones et les Franco-Ontariens devant mes croyances politiques ou mes affiliations politiques.

La sénatrice Poirier : Vous avez indiqué que votre objectif était de devenir sénatrice, mais que le gouvernement libéral vous croyait trop partisane pour être nommée à la Chambre haute. Cependant, vous voilà maintenant candidate à un poste de la plus haute importance qui doit être impartial, soit celui d'agent du Parlement.

Pouvez-vous expliquer la différence entre le poste de sénatrice et celui d'un agent du Parlement? Comment vous attendez-vous à réconcilier plus de 13 ans de partisanerie politique avec le poste d'agent du Parlement?

Mme Meilleur : Je tiens à préciser que ce n'est pas moi qui ai créé les règles quant au poste de sénatrice. Oui, à un moment donné, j'ai pensé vouloir intégrer le Sénat, compte tenu de sa nouvelle structure et du nouveau processus de nomination, mais on m'a informée qu'aucun politicien qui venait de quitter son poste ne pourrait être nommé au Sénat.

Plus tard, lorsque le commissaire aux langues officielles, Graham Fraser, m'a informée que son poste serait bientôt être vacant, je m'y suis intéressée. Depuis 25 ans, les langues officielles ont été ma passion, autant à titre de conseillère municipale dans le cadre de la politique sur le bilinguisme à Ottawa que lorsque j'ai fait partie du mouvement qui s'est assuré que cette politique soit adoptée à la Ville d'Ottawa. Je voulais donc continuer à travailler pour la francophonie et les langues officielles. Je voyais ces deux avenues. Lorsque j'ai su que le poste de commissaire allait se libérer, je savais que j'avais une pente à gravir. Étant donné que j'avais déjà fait de la politique, j'ai décidé de proposer ma candidature et me voici, après être passée par un processus très rigoureux.

(1920)

Je peux vous assurer que les langues officielles resteront toujours pour moi un enjeu important, comme cela a été le cas lorsque j'ai été ministre déléguée aux Affaires francophones de l'Ontario pendant plus de 12 ans.

J'ai une passion pour les langues officielles, et j'espère qu'à la fin vous en serez tous convaincus. Je suivrai les pas du commissaire sortant, M. Graham Fraser, avec qui j'ai travaillé pendant 12 ans et qui a accompli un excellent travail. Je suivrai ses traces afin de continuer d'améliorer la situation francophone hors Québec et d'aider les communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada.

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