Le lundi 24 avril 2023 - Étude sur les services de santé dans la langue de la minorité - Divers témoins

La sénatrice Poirier : Merci à tous les témoins d’être avec nous ce soir. Ma question s’adresse à M. Désilets et concerne la consultation entre la Société Santé en français, les réseaux de la santé en français et le gouvernement fédéral. Êtes-vous satisfait des mécanismes de consultation en place? Sont-ils efficaces? Doivent-ils être améliorés et si oui, par quels moyens?

M. Désilets : Je vous remercie de la question. Je pense que les mécanismes de consultation sont assez efficaces. La dernière consultation a récolté des réponses de plus de 1 500 répondants francophones et anglophones; sur le plan de la consultation pour un ministère, c’est très élevé. C’était dans le cadre de l’élaboration du Plan d’action pour les langues officielles de 2018-2023. En ce qui concerne l’efficacité des consultations, je pense qu’elles ne génèrent pas toujours les résultats escomptés. Avec le projet de loi C-13, on a vu qu’on avait besoin d’une agence centrale pour s’assurer que les différents ministères agissent de la même façon.

Le rôle de Santé Canada doit être bien défini dans le plan d’action et s’aligner aux objectifs du plan; il y aura du travail à ce niveau. L’enjeu n’est pas lié à la consultation, mais plutôt à la collaboration.

La sénatrice Poirier : Tenez-vous des consultations avec le gouvernement?

M. Désilets : Avec le ministère, on a deux rencontres par année du comité consultatif sur les communautés de langue officielle et il y a des consultations ponctuelles, dont celle de 2022 dont je vous ai parlé.

La sénatrice Poirier : Ma deuxième question s’adresse aussi à M. Désilets et concerne la reconnaissance des titres de compétences étrangers pour faciliter la mobilité des travailleurs de la santé partout au pays. Avez-vous des recommandations à faire au gouvernement fédéral afin d’améliorer ces compétences? Selon vous, quel rôle les différentes associations professionnelles peuvent-elles jouer dans la reconnaissance des titres de compétences étrangers?

M. Désilets : C’est une bonne question. En ce qui a trait à la reconnaissance des diplômes, je pense qu’au fédéral, on pourrait reconnaître un seul examen d’entrée aux différentes professions. Beaucoup de provinces et territoires font leurs propres choix, ce qui amène maintenant des qualifications différentes, par exemple, entre les infirmières formées au Québec et celles qui sont formées au Nouveau-Brunswick. Ce ne sont pas les mêmes tests.

On peut ajouter à cela des ententes provinciales avec d’autres pays sources d’immigration, ce qui crée également des écarts de mobilité. Par exemple, au Québec, il y a une entente avec la France, grâce à laquelle les gens peuvent venir au pays et se faire reformer assez rapidement, ce qui n’est pas possible à certains endroits. D’autres provinces veulent suivre cet exemple et recréer cela; le Nouveau-Brunswick progresse dans cette voie actuellement.

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La sénatrice Poirier : Encore une fois, merci aux témoins de toutes leurs bonnes réponses. J’ai une question pour qui voudra y répondre. Elle porte sur le Plan d’action pour les langues officielles. Le budget de 2023 prévoit d’investir 373,7 millions de dollars de plus sur cinq ans, à compter de 2023-2024, pour appuyer la mise en œuvre du prochain Plan d’action pour les langues officielles, ainsi que 117 millions de dollars sur cinq ans dont une partie servira à soutenir la formation d’infirmières et de préposés de soins. Est-ce que ces montants sont suffisants pour combler le manque à gagner? Quel impact ces fonds auront-ils?

M. Désilets : Je pense que quand vous posez cette question, la réponse est rarement positive. Ce n’est pas suffisant. Nous avons dépensé l’an dernier plus de 300 milliards de dollars en santé au Canada, si on mélange les investissements fédéraux, provinciaux et territoriaux. Je pense que c’était 308 milliards de dollars l’an dernier. L’apport du fédéral est d’environ 40 milliards de dollars en transferts, mais 40 millions par année sont alloués au Programme pour les langues officielles en santé pour deux communautés de langue officielle dans 13 systèmes de santé. Sur chaque 100 $ dépensé en santé au Canada, un cent va au Programme pour les langues officielles. C’est insuffisant. Ce n’est pas seulement au gouvernement fédéral d’être à la table. Les provinces ont aussi la responsabilité de mettre leurs propres fonds pour leurs communautés. Est-ce qu’on verra un impact? Je pense que oui.

On a réussi à renouveler notre entente de financement avec Santé Canada sans attendre le plan d’action, mais cela s’est fait sur la base des montants de 2018. Vous avez vu, comme moi, que le coût de la vie a augmenté de façon substantielle depuis 2018. Donc, on commence ce mois-ci avec un pouvoir d’achat effectif qui a diminué de 8 % à 9 % par rapport à ce qu’on avait en 2018.

C’est une réduction effective de l’appui envers les communautés de langue officielle. J’espère que le plan d’action qui sera dévoilé bientôt rétablira les choses.

La sénatrice Poirier : Quelles sont vos attentes par rapport au plan d’action qui sera dévoilé cette semaine?

M. Désilets : Mes collègues en ont un peu parlé, mais on s’attend à un financement de base pour les organismes, pas à un financement ponctuel ou pour des priorités à court terme. On a besoin de renforcer nos capacités d’organismes communautaires.

Dans bien des cas, comme celui du réseau que vous voyez ici, ces organismes comptent une ou deux personnes au Canada. Leur rôle est d’influencer un système de santé. C’est un travail colossal; c’est David contre Goliath un peu partout. On a besoin de financement de base pour augmenter nos capacités à influencer les autres et pour redonner davantage par la suite aux communautés que l’on sert.

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